Liban, lève-toi et sors de ton tombeau !
Jésus décida, au jour anniversaire de sa résurrection d’entre les morts, de revenir dans les environs de Tyr et Sidon (Mt. 15,21), à la terre qu’il a bénie et au pays qu’il a aimé.
On lui a dit : le pays que Tu aimes, comme Lazare, est malade, paralysé, abattu, effondré, pillé, abandonné au sort des mafias et des milices dans leur corruption, leur haine, leur vengeance et leurs guerres. Il est par conséquent sur le point de mourir.
Jésus leur dit : « Cette maladie n’aboutira pas à la mort, elle servira à la gloire de Dieu : c’est par elle que le Fils de Dieu doit être glorifié ». Puis il ajouta : « Notre ami le Liban s’est endormi, mais je vais aller le réveiller » (Jean 11, 4 et 11).
Lorsque Jésus arriva, Il vit que le Liban était au tombeau depuis longtemps. « Il frémit intérieurement, Il se troubla et pleura » (Jean 11, 33 et 35).
Il dit alors aux Libanais désespérés se tenant devant lui : « Je suis la Résurrection et la Vie, croyez-vous cela ? » (Jean 11, 25).
Ils lui répondirent :
Voici que le Liban, pays message, passe aujourd’hui par une épreuve très difficile qui a causé chez ses enfants le désespoir et l’inquiétude pour l’avenir, comme si sa vocation et sa mission étaient finies en Orient et dans le monde.
Nous sommes venus chez Toi, Ô Jésus, portant nos préoccupations et nos tragédies quotidiennes, car notre vie au sein de notre État est devenue quasi impossible et nous sommes devenus incapables d’affronter les défis économiques, monétaires, sociaux, politiques et sécuritaires. Et en conséquence, nous souffrons de la pauvreté, de la famine, du manque de soins sanitaires et d’éducation, et de l’émigration, notamment celle de nos jeunes et de nos élites.
Nous souffrons également de la mauvaise réputation de notre pays car des amis à travers le monde nous répètent : votre État est corrompu, pillé et failli et est classé au nombre des pays ratés ; et si vos responsables ne se reprennent pas et ne commencent à appliquer les réformes, vous êtes voués à la finitude. Ils vous ont mis au tombeau et vous êtes désormais comptés parmi les morts.
Nous sommes venus Ô Jésus, avec Marthe et Marie, Te dire : « Seigneur, si Tu avais été ici, notre Liban ne serait pas mort ! Mais nous croyons que Tu es le Christ, le Fils de Dieu, Celui qui vient dans le monde » (Jean 11, 27).
Jésus parvint au sépulcre, s’est tenu devant le Liban mort et enseveli, et dit aux Libanais : Ôtez la pierre. Ils ont répondu : il y a longtemps qu’il est mort, il doit déjà sentir la faillite et la corruption.
Jésus dit : Ne vous ai-je pas dit que si vous croyez, vous verrez la gloire de Dieu ?
Puis il leva les yeux vers le ciel et dit : « Père, je Te rends grâce de ce que Tu m’as exaucé. Certes je savais bien que Tu m’exauces toujours, mais j’ai parlé à cause de cette foule qui m’entoure, afin qu’ils croient que Tu m’as envoyé » (Jean 11, 41-42).
Puis il cria d’une voix forte : Liban, lève-toi et sors de ton tombeau ! Et le Liban sortit, reprit sa bonne santé et se remit à accomplir sa mission dans la liberté, la dignité et la convivialité dans le respect des diversités et son service humanitaire, religieux social et culturel.
Mes frères Chrétiens, mes frères Libanais
Accueillons Jésus Christ ressuscité d’entre les morts dans la joie, la foi et l’espérance.
Profitons de cette occasion pour lire les signes des temps qui sont en notre faveur, pour découvrir la volonté de Dieu et témoigner sa présence au milieu de nous.
Cessons de traiter avec le monde des morts, le monde de la corruption et de la faillite.
Roulons la pierre de nos tombes calcifiées qui représentent nos corps mortels, nos avidités et nos égoïsmes. Roulons la pierre des cœurs pétrifiés des hommes politiques et de nos cœurs ; elle nous empêche de nous rencontrer et de rencontrer le Christ qui nous précède partout où nous sommes appelés à porter notre mission privilégiée.
Libérons-nous du suivisme qui nous asservit et unissons-nous pour décider nous-mêmes de notre sort.
Le Christ nous a libérés par sa mort et sa résurrection pour être libres et devenir les prophètes de la Vérité dans notre monde.
Collaborons ensemble à construire ce qui a été détruit dans notre société, notre État et notre Patrie, et à restaurer les mœurs qui ont été dépravées et les valeurs qui ont été perdues.
Notre espérance est grande que nous ressusciterons avec le Liban pour y être des messagers de charité, de fraternité et de paix.
Notre espérance est grande que le Liban, le pays que Jésus a tant aimé et dressé comme modèle, ressuscitera à une vie nouvelle par les efforts de chacun et par l’intercession de la Très Sainte Vierge Marie, sa Mère et Notre-Dame du Liban qui l’a accompagné sur notre terre et continue de nous accompagner.
Le Liban est une terre bénie de Dieu pour être le pays de la rencontre dans la liberté et un espace de dialogue où ses enfants construiront ensemble la paix.
Christ est ressuscité. Il est vraiment ressuscité.
Message de Pâques, 9 avril 2023
+ Père Mounir Khairallah, Evêque de Batroun