Chers amis,
Début janvier, j’ai appris que Louis Ribes (1920-1994), prêtre et artiste réputé dans la région lyonnaise, aurait pu commettre des abus sexuels sur des mineurs à Grammond, son village natal. Il y revenait pendant les vacances et y avait réalisé deux tableaux qui ornaient le chœur de l’église Saint-Pierre. Avec Monsieur le Maire et le diacre Jean-Louis Reymondier, responsable de l’Antenne diocésaine de prévention et de lutte contre les abus sexuels, nous avons alors convenu d’une rencontre publique d’information et d’échanges pour favoriser une libération de la parole, étape si importante dans ces situations. De plus il fallait aussi envisager ensemble l’avenir des tableaux réalisés pour l’église.
Cette réunion s’est tenue ce mardi 18 janvier, à la salle d’œuvre, en présence d’une soixantaine de personnes. Nous l’avions souhaitée uniquement locale, elle a été fortement médiatisée. La presse et les caméras ont cependant accepté de se retirer durant les échanges. La rencontre a été d’une très grande intensité. Des vérités très douloureuses, et souvent enfouies depuis longtemps, ont pu être exprimées, dans un climat de confiance et de respect mutuel. On sait combien les expériences, les blessures et les appréciations peuvent être vécues très différemment selon les personnes. Nous avons tous été bouleversés par ce moment de vérité et, je crois, de libération. Vous avez fait mon admiration.
Nous savons que Louis Ribes a marqué beaucoup de personnes à Grammond. Son charisme, ses talents d’artistes, sa proximité avec tous ont été évoqués, tout comme son souci de permettre à des enfants de découvrir le monde de la peinture, de la musique, de la pyrogravure, du cinéma… Tout ceci a créé des amitiés et de la reconnaissance, sans parler des deux belles œuvres réalisées pour l’église. Mais Louis Ribes avait aussi une face cachée et profondément perverse, utilisant son aura et ses talents pour abuser et manipuler des enfants, des jeunes et leurs parents. Il était important que cette réalité puisse être mise en lumière. Sous une douceur apparente et de fausses justifications, il a posé des gestes qui étaient de véritables agressions, une violation de l’intimité des enfants. Ils ont pu avoir des conséquences très lourdes dans la vie de certains. Ces faits sont extrêmement graves et il était important que la vérité se fasse. J’exprime toute ma proximité à chacune des personnes victimes, abusée dans son innocence et blessée dans sa chair et dans son âme. Je l’exprime aussi à tous les proches, parents, amis ou voisins qui ont été trahis par le Père Louis Ribes : vous n’avez pas à porter le poids de ses agissements.
La rencontre de mardi dernier marque une étape importante sur ce chemin de vérité et de libération. Nous invitons les personnes victimes qui le souhaitent à continuer de se manifester auprès de notre cellule diocésaine d’accueil et d’écoute(1). Il est important qu’elles puissent donner leur témoignage. Il sera proposé, à celles qui le souhaitent, un parcours personnel d’accompagnement et de réparation pour engager ou poursuivre un chemin de reconstruction. Ce dispositif vient d’être mis en place par une instance indépendante, pour l’Eglise de France. Un groupe de parole va aussi être proposé à Grammond, pour ceux qui le souhaitent.
L’Evangile apporte une parole de libération et de vie, d’amour authentique plus fort que le mal. Pour le signifier, je viendrai célébrer l’Eucharistie à Grammond, le dimanche 20 mars à 10h30, date qui marquera, pour toute l’Eglise de France, un jour particulier de mémoire et de prière à l’attention des personnes victimes des abus sexuels. Je me rendrai aussi disponible en mars pour visiter personnellement ceux qui le souhaitent, et pourquoi pas venir bénir leur maison. Le Père Floribert Mulumba, curé de la paroisse, et les diacres Robert Laval et Philippe Néel se tiennent aussi à votre disposition.
Quant aux œuvres présentes dans l’église, étant donné la manière dont elles ont été réalisées et les souvenirs douloureux qu’elles ravivent chez les victimes, il est apparu évident, lors des échanges de mardi dernier, qu’il fallait les décrocher sans tarder. Ceci a été fait dès le surlendemain. Comme l’a indiqué Monsieur le Maire, il nous faut prendre maintenant le temps de réfléchir à une œuvre nouvelle qui puisse garder la mémoire de ce drame et surtout signifier la victoire du bien, du beau, de la justice et de la vie !
Soyez assurés de mes sentiments les plus chaleureux au cœur de cette épreuve et de ma disponibilité. Dans la confiance et l’espérance.
+ Sylvain Bataille, évêque de Saint-Etienne
Le 25 janvier 20222
Cellule d’accueil et d’écoute pour les personnes victimes d’abus sexuels et pour leurs proches.           Tél : 04 77 59 30 66   Mail : accueil.victimes@diocese-saintetienne.fr