L’espérance ne déçoit pas
Message de Mgr Sylvain Bataille
Et pourtant les déceptions ne manquent pas dans nos vies, mais peut-être sont-elles à la mesure de nos espoirs ! L’espoir humain est une force naturelle qui nous pousse à désirer et à rechercher un avenir meilleur, de paix, de joie, de vie, pour nous et pour les autres. Cette capacité à espérer est essentielle, car elle donne une impulsion pour avancer, mobiliser nos forces et celles des autres, pour relever des défis, faire des projets et surmonter des épreuves. Elle nourrit l’enthousiasme et le courage, elle soutient l’action face aux obstacles. Cependant, l’espoir reste conditionné par les situations extérieures et les capacités humaines. Il est donc fragile et limité. Face aux échecs ou aux imprévus, il peut vaciller, il est bien souvent déçu. Les autres, nous-même, et Dieu lui-même ne répondent pas à nos attentes qui semblent pourtant bien légitimes. C’est ainsi que s’installe le découragement, voire le désespoir. Rien ici-bas ne pourra jamais combler pleinement notre cœur, car les désirs sont trop profonds, les péchés sont trop graves et les attentes ne sont pas toujours ajustées au réel et au vrai bien pour nous et pour les autres. Nous faisons tant d’erreurs de jugement, cherchant le bonheur là où il n’est pas, demandant aux autres ce qu’ils ne peuvent nous donner.
Si l’espoir déçoit, seule l’espérance ne déçoit pas, car elle est fondée non pas sur nos forces humaines ou les circonstances du monde, mais sur Dieu lui-même. Notre monde marqué par la désillusion sur le progrès, sur la vie sociale, sur le cœur de l’homme, a un immense besoin d’espérance. Le Pape François a été particulièrement inspiré d’en faire le thème de l’Année sainte 2025 qui vient de s’ouvrir, en reprenant la phrase de saint Paul : « L’espérance ne déçoit pas, parce que l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné » (Rm 5, 5).
Passer de l’espoir à l’espérance, c’est prendre de la hauteur, choisir de faire confiance, inscrire sa vie et ses projets dans la volonté de Dieu qui est tellement plus sûre que la nôtre. L’espérance ne repose pas sur nos propres forces, mais sur Dieu qui est tellement grand et tellement bon. Elle nous oriente vers l’éternité car il y a des choses qui ne trouveront leur résolution que dans l’au-delà de ce monde.
L’espérance pousse à un décentrement de soi, à une humilité pour accueillir sa propre vie et les autres tels qu’ils sont, en remettant tout entre les mains du Père. En effet, dans sa Providence il conduit, toute chose vers le bien, réalise ses promesses en son temps, à sa manière, et qui pourrait la contester ? Cette espérance est une lumière pour nos vies, une force intérieure qui nous pousse à avancer, à agir, même au milieu des tempêtes. Elle nous permet de discerner les signes de la présence de Dieu, de nous réjouir de son action au cœur de notre monde, dans notre vie, et dans celle des autres même lorsqu’ils semblent extérieurement loin de Dieu, de l’Église. C’est une erreur aux conséquences très graves de ne voir que le mal, comme s’il était tout-puissant. Voilà encore un gros mensonge du Démon, peut-être même le plus gros ! Le Royaume de Dieu a une force en lui que rien ne peut détruire ou même arrêter, pas même les puissances du Mal, ce qui n’empêche cependant pas Dieu de respecter infiniment la liberté de chacun. Nul ne peut être forcé à aimer.
Être témoin de l’espérance consiste à choisir de faire confiance à Dieu jour après jour, de vivre et de rayonner cette confiance, une confiance solidement fondée sur notre foi en Jésus-Christ ressuscité. Cela demande une vie de prière pour être vraiment ouvert à l’action de l’Esprit. L’espérance conduit alors naturellement à la charité, à un engagement concret au service des autres, particulièrement des plus fragiles. Comment pourrions-nous davantage vivre dans l’espérance en cette Année sainte ? Comment pourrions-nous être tout particulièrement attentifs à ceux qui désespèrent, qui se pensent enfermés dans une situation sans issue, seuls ? Ne les fuyons pas, demandons à Dieu de nous inspirer et osons agir, avec sagesse et audace, car l’espérance ne déçoit pas.
