Allons-nous oser les Fraternités ?
Message de Mgr Sylvain Bataille
Un double constat s’impose dans mes visites en paroisse aujourd’hui. D’une part beaucoup partagent leurs difficultés à renouveler les équipes, à trouver des successeurs quand l’âge avance, d’autant plus que certaines paroisses peuvent être de grande taille, les charges sont donc plus lourdes. D’autre part, de plus en plus de jeunes ou de moins jeunes viennent frapper à la porte de l’Église pour demander à découvrir et à approfondir la foi chrétienne. Manifestement une époque se termine et une autre s’ouvre. La grande tentation serait de commencer par demander à ceux qui nous rejoignent de venir simplement boucher nos trous, faire ce que nous ne pouvons plus faire… On risque alors de les « utiliser », de les écraser et de les faire fuir.
Commençons donc par le commencement ! Commençons par vivre la fraternité à taille humaine, simplement, dans la gratuité de la relation, ce qui va permettre d’accompagner les personnes qui veulent découvrir la foi et de renouveler celles qui sont engagées depuis longtemps dans la vie de l’Église, pour que, tous ensemble, nous soyons disciples-missionnaires. Les premières communautés chrétiennes (Ac 2, 42-47) nous donnent l’exemple d’un partage profond de la foi et de la vie quotidienne. Se rassembler en petites fraternités, chaleureuses, permet de créer des liens authentiques, de partager ses joies et ses peines, ses découvertes et ses questions, en se laissant éclairer par la Parole de Dieu, par l’expérience des autres, en se soutenant mutuellement, pour avancer ensemble à la suite du Christ. Le cadre « familial » favorise l’écoute, la confiance. Il offre aussi un espace d’accueil pour ceux qui sont loin de l’Église, en quête de sens. En cultivant ces petites communautés, l’Église redevient une famille, proche, où chacun trouve sa place, tel qu’il est, dans la diversité des âges, des expériences et même des cultures. Dans un monde marqué par l’individualisme, les paroisses ne doivent-elles pas d’abord redevenir des lieux de fraternité simple, vivante et ouverte ? Alors le rassemblement dominical prendra tout son sens, comme un lieu de ressourcement fondamental autour du Christ, lieu où l’on élargit son cercle de relations. Alors la paroisse pourra se renouveler parce que de nouvelles personnes vivront au quotidien leur foi et auront le désir de s’engager dans la mission de l’Église, avec ce qu’elles sont.
C’est dans cet esprit que le « Parcours espérance » du Diocèse a été conçu. Son objectif est missionnaire. Il s’agit de constituer des fraternités qui rassemblent des personnes engagées dans notre Église et d’autres qui peuvent être plus éloignées, peut-être éprouvées ou isolées, en recherche intérieure, en fragilité. La mise en œuvre de ce parcours est très simple, car il part de la vie quotidienne, pour que tous puissent s’exprimer. Il laisse la place à l’amitié et à la prière. Il est prévu en quatre rencontres, à vivre entre le mois de mars et le mois de juin. Ce « Parcours espérance » risque de nous décevoir si nous le vivons uniquement « entre nous », avec notre cercle des habitués. C’est un « outil » missionnaire. Je demande donc à toutes les équipes constituées (équipes de liturgie, fraternités existantes, équipes de la Pastorale en monde populaire, équipes de mouvements…) de se séparer pour constituer des binômes ou des trios qui osent inviter d’autres personnes, très largement ; cela peut être des voisins, des collègues de travail, des connaissances… en privilégiant les liens de proximité. Nous avons à faire confiance à l’Esprit qui saura nous guider vers des personnes que nous n’imaginions pas intéressées et permettre de nouvelles rencontres, probablement très riches. Nous n’avons pas à nous inquiéter pour l’animation, tout est prévu dans le livret. Il faut simplement se lancer. Allons-nous oser ? C’est ce que je demande à toutes les paroisses, à tous les catholiques du diocèse. Nous ne pouvons pas rester entre nous quand nous voyons à quel point aujourd’hui Dieu touche les cœurs et nous demande d’ouvrir nos portes. La mission n’est pas si compliquée, il faut simplement oser. Allons-nous oser ?
+ Sylvain Bataille, évêque de Saint-Étienne